lundi 31 janvier 2011
« Il y a une certaine fécondité dans la contrainte »1
Compte-Rendu du CTPD « Collèges » de la Somme du vendredi 28 janvier 2011
Les 4 organisations syndicales représentatives (FO, FSU,
Unsa-Éducation et Sgen-CFDT) ont commencé par lire chacune leur
déclaration préalable qui toutes dénonçaient la suppression de
postes pour les collèges du département. Vous trouverez celle du
Sgen-CFDT à la suite de ce compte-rendu.
Dans sa réponse aux organisations syndicales l’Inspecteur
d’Académie a rappelé que le budget de l’Éducation Nationale
restait le 1er budget de l’État et que depuis 1980 il avait connu
une augmentation moyenne de 2,2%, supérieure au taux de l’inflation.
En réponse au Sgen-CFDT qui avait évoqué l’enquête PISA, il a
relativisé son impact en évoquant le fait que la France met plus de
moyens que la moyenne des pays de l’OCDE.
Il a, comme le Recteur en CTP Académique le 10 janvier dernier, affirmé la nécessité de reconsidérer les structures éducatives du département. En exemple, Il s’est référé au réseau des écoles du département : des petites écoles qui seraient peu efficientes, ainsi qu’à certaines options en lycée peu fréquentées et qui donc coûtent cher. Pour lui revoir cela c’est avoir la possibilité de dégager des moyens tout en améliorant l’efficacité
du système. Il
n’a pas parlé des petits collèges mais ce sera
peut-être pour l’an
prochain.
Il a conclu avec la phrase de Claude Thélot qui sert de titre (provocateur) à ce compte-rendu : « Il y a une certaine fécondité dans la contrainte ».
À notre sens elle résume bien l’état d’esprit dans lequel se
trouve l’ensemble de notre hiérarchie jusqu’au ministre : les
contraintes budgétaires sont incontournables et de toute façon on
peut faire mieux avec moins !
Pour le Sgen-CFDT cette démarche est inacceptable !. Si nous considérons que le réseau scolaire doit évoluer du fait de la démographie, des déplacements de population, de besoins nouveaux,
…, pour nous ce ne peut être à partir de la seule contrainte
budgétaire. Que l’on s’interroge sur la pertinence et l’efficacité
de petites structures scolaires alors qu’on organise une grande
réflexion nationale. On est bien capable de le faire pour les
rythmes scolaires ! De même si on pense que le système d’options du lycée
doit être revu, il est toujours possible de proposer une réforme
qui ne s’arrête pas dès que le moindre lobby se met à parler un
peu fort. Notre organisation est prête à discuter, à proposer, à s’impliquer fortement
pourvu que l’on se situe dans le cadre d’une négociation
respectueuse de toutes les parties.
Les syndicats ont évoqué les C.U.I (contrat Unique
d’Insertion) à travers les fins de contrat annoncés dans nombre
de collèges. L’IA a rappelé que cela relevait de la politique de
l’emploi et que le ministère de l’Éducation Nationale n’en était
pas responsable. Il a jugé que relativement aux autres ministères
le nôtre avait plutôt était bien servi mais que les personnels
recrutés étaient destinés prioritairement à l’aide aux jeunes
souffrant d’un handicap.
Le débat a continué sur les chiffres qui montrent tous une
détérioration des indicateurs si l’on regarde leur évolution
depuis une dizaine d’années. Parallèlement, l’augmentation de la
charge de travail hors-enseignement a été rappelée ainsi que la
quasi-disparition de la formation continue (sans oublier la
formation initiale). Tout ceci n’a pas fait évoluer le dossier
et le CTP s’est terminé comme il avait commencé avec la même DHG.
Toutefois, l’Inspecteur d’Académie a dit qu’il recevrait les équipes qui auraient des revendications. Aussi n’hésitez pas à préparer vos arguments et à utiliser tous les moyens à votre disposition.
1 Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, le 26/01/ 2011 lors d’un « Rendez-vous de l’éducation » organisé par l’AEF avec comme thème « Les moyens de l’Éducation nationale en débat »
CTPD
de vendredi 28 janvier 2011
Ce CTPD consacré à la préparation de la rentrée dans les collèges s’inscrit une fois de plus dans le cadre de la réduction des moyens de la fonction publique pilotée par la RGPP. La grande nouveauté, cette année, c’est que nous avons dépassé les effets de seuil à
partir desquels la destruction du service public d’éducation devient visible. Ce que le gouvernement pouvait faire passer, aux yeux de l’opinion publique, comme une chasse au gaspillage des moyens apparaît aujourd’hui sous son vrai visage : le déni complet d’un modèle d’éducation, pas au nom de la réussite des élèves mais à celui d’une réduction pure et simple des coûts, sans se poser la question de l’avenir des générations concernées.
En effet, globalement, selon les documents détaillant les moyens que l’Inspection Académique prévoit d’attribuer aux collèges du département et en les comparant à ceux prévus pour la rentrée 2010, alors qu’on attend 541 élèves de plus, les moyens d’enseignement y sont réduits ! Cette dotation va supprimer toute marge d’autonomie, contrairement aux discours tenus par le ministre et son administration, et aboutira inéluctablement à un alourdissement des effectifs par classe. 14 collèges voient même le nombre d’élèves augmenter alors que leur DHG va baisser sensiblement !
En 1989, sous le titre un rien provocateur « Le niveau monte », deux sociologues décrivaient un système scolaire français très performant pour l’élite des bons élèves, dont le nombre et le niveau augmentaient, mais sans pitié pour les élèves les plus fragiles, de plus en plus faibles et de plus en plus nombreux. Vingt ans plus tard, la dernière enquête comparative PISA sur le niveau de compétences des élèves de 15 ans débouche sur un constat dégradé caractérisé en particulier par :
Alors que l’étude PISA de l’OCDE vient de mettre en évidence l’incapacité de la France à tirer vers le haut ses élèves les plus fragiles, comment imaginer que le système éducatif puisse s’améliorer, quand il est saigné à blanc (65.000 suppressions de postes entre 2007 et 2011 en vertu de la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite) ? Qui peut croire sérieusement que l’on peut faire mieux avec moins ?
Avec la politique choisie par le ministre de l’Éducation nationale, c’est aujourd’hui la réussite des plus fragiles qui est mise en jeu. Ainsi la dotation moyenne par élève baisse dans la plupart des collèges en RAR. Ce qui est nécessaire aux équipes, afin qu’elles puissent prendre du recul, tirer des bilans, construire des projets, bref être innovantes au nom de la réussite des élèves qui leur sont confiés, c’est du temps. Du temps pour la concertation, non seulement au sein des établissements, mais aussi au sein d’un territoire avec les écoles, les associations etc... Ce temps, ce sont les dotations aux établissements qui doivent l’accorder : quelles possibilités restera-t-il après les coupes sombres de cette année ?
En tout état de cause, nous ne pouvons accepter l’idée que des établissements (ou des écoles) accueillant un nombre significatif d’élèves en difficulté puissent ne pas faire l’objet d’une attention particulière quand il s’agit de leur octroyer les moyens de fonctionnement indispensables. Il est impensable qu’un établissement qui avait bénéficié de moyens supplémentaires pour compenser la difficulté à enseigner sur un territoire, afin de construire et faire vivre des réseaux qui travaillent à la réussite des élèves, voit ces moyens disparaître au seul motif d’avoir réussi, par le travail en équipe et en réseau, à réduire de façon significative l’échec scolaire sur ce territoire. C’est mettre en grand péril ces avancées toujours fragiles, et surtout c’est envoyer un message contraire aux buts attendus.
Tous ces choix qui affaiblissent l’école publique nous conduisent à nous demander comment elle peut amener les élèves les plus fragiles à avoir de l’ambition quand elle n’a pas d’ambition pour elle-même.